Alexei Navalni condamné à près de trois ans de prison

02 février 2021 – 15h39
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Agence AFP

Un tribunal de Moscou a ordonné mardi l’emprisonnement de l’opposant russe Alexei Navalni pendant près de trois ans, une affaire qui a déclenché des marches massives en sa faveur à travers la Russie et de nouvelles tensions entre le Kremlin et l’Occident.

La juge Natalia Repnikova a déclaré que Navalni, le principal critique du Kremlin, avait violé les conditions d’un contrôle judiciaire et devra purger la peine de prison avec sursis de 2014.

Pour cela, il devra purger sa peine initiale de trois ans et demi, moins les mois passés en résidence surveillée cette année-là.

Son avocate, Olga Mijaylova, a indiqué que son client devra passer «environ» deux ans et demi en prison. Il fera appel de la décision, a-t-il ajouté.

Il s’agit de la première longue condamnation de l’activiste anti-corruption de 44 ans.

Suite à l’annonce de la décision, son organisation, le Fonds anti-corruption, a convoqué une manifestation juste devant le Kremlin.

« Nous nous sommes rencontrés immédiatement dans le centre de Moscou », a déclaré l’organisation sur Twitter.

Des dizaines de policiers ont été rapidement déployés sur les lieux, selon un journaliste de l’AFP. Les stations de métro de la zone ont été fermées, selon les agences russes, qui ont déjà signalé les premières arrestations.

L’Union européenne, les États-Unis, l’Allemagne, le Royaume-Uni, la France, entre autres, ont appelé à la libération immédiate de l’opposant. Le Conseil de l’Europe les a rejoints, qualifiant la condamnation de « contraire aux obligations de la Russie en matière de droits de l’homme ».

Moscou a biffé ces appels à «l’ingérence».

Navalni écouta la phrase, debout, les mains dans les poches, dans la cabine de verre réservée aux détenus. Il fit un geste en forme de cœur à sa femme Yulia.

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Lors de l’audience, il avait dénoncé une affaire destinée à museler les opposants de Vladimir Poutine.

« L’empoisonneur en slip »

« La chose la plus importante dans ce procès est de faire peur à un grand nombre de personnes. L’un est emprisonné pour effrayer des millions de personnes », at-il dit.

Il a également dénoncé les milliers d’arrestations lors des plus grands rassemblements d’opposition de ces dernières années. « Vous ne pourrez pas emprisonner tout le pays! », A ajouté l’opposant, détenu depuis le 17 janvier.

Puis il a répété que Poutine était celui qui avait ordonné aux services de sécurité de le tuer, l’empoisonnant en août en Sibérie avec l’aide d’un agent neurotoxique.

Poutine « restera dans l’histoire comme empoisonneur des sous-vêtements », a-t-il déclaré.

En décembre, Navalny a affirmé dans une vidéo qu’il avait démasqué un agent du FSB par téléphone qui avait révélé que le poison avait été placé dans ses sous-vêtements.

La procédure de mardi portait sur une réclamation des services pénitentiaires selon laquelle Navalni n’aurait pas respecté son contrôle judiciaire dans le cadre de sa condamnation avec sursis.

Le militant a déclaré avoir informé les autorités de sa convalescence en Allemagne. Il a été arrêté immédiatement à son retour en Russie.

Sa tentative d’assassinat et son arrestation ont déclenché de nouvelles tensions entre la Russie et l’Occident. Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, doit se rendre à Moscou vendredi et a demandé à voir Navalni.

Le gouvernement russe a espéré ce mardi que l’Union européenne (UE) ne commettrait pas la «folie» de conditionner ses relations avec Moscou sur le sort «d’un détenu dans un centre de détention», selon le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov.

Affaires judiciaires multiples

Navalni fait l’objet de multiples procédures judiciaires.

Vendredi, il comparaîtra pour « diffamation » contre un ancien combattant. Il est également accusé dans une enquête de fraude, un crime passible de dix ans de détention, pour avoir détourné, selon les autorités, des dons en direction de son organisation.

Depuis son retour à Moscou, la justice russe a multiplié les actions contre Navalni et ses alliés politiques, dont presque tous sont assignés à résidence, emprisonnés ou poursuivis depuis quelques semaines.

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L’opposition a réussi à mobiliser ses partisans avec deux week-ends consécutifs de manifestations dans une centaine de localités, pas seulement à Moscou et à Saint-Pétersbourg.

La réponse de la police a été massive: dimanche, il y a eu plus de 5 400 arrestations à travers le pays, un record dans l’histoire récente de la Russie, selon l’ONG OVD-Info.

Ces manifestations sont également alimentées par la diffusion d’une enquête de l’opposition qui accuse Poutine de bénéficier d’un «palais» au bord de la mer Noire, téléchargé plus de 100 millions de fois sur YouTube.