L’UE, l’Inde et le contrepoids à la Chine

L’Union européenne et l’Inde ont annoncé qu’elles étaient en pourparlers pour établir un effort conjoint visant à construire des projets d’infrastructure qui relient l’Asie, l’Europe et l’Afrique, par le biais de ponts, de routes, de chemins de fer, entre autres, qui augmentent la connectivité et la compétitivité de ces régions.

Ce que l’Union européenne et l’Inde proposent viserait à inclure le transport de l’énergie et les routes numériques, tout en garantissant une meilleure protection juridique et une réduction du fardeau de la dette pour les pays qui rejoignent ce groupe. En outre, cette plateforme chercherait à contrebalancer l’Initiative de la Ceinture et de la Route (BRI) conçue et proposée par Xi Jinping en 2013, qui vise à construire une «nouvelle route de la soie» à travers les liaisons maritimes et ferroviaires. En outre, le gouvernement chinois aspire à relier la Chine et l’Europe, à travers le Kazakhstan, la Russie, la Biélorussie et la Pologne, et ainsi accroître sa puissance géopolitique.

L’importance de ce contrepoids de l’Europe à la Chine réside dans ce que Robert Blackwill et Jennifer Harris ont défini comme la géoéconomie. Dans leur livre War by Other Means, ils définissent ce terme comme l’utilisation d’instruments économiques pour promouvoir et défendre les intérêts nationaux, qui produisent des résultats géopolitiquement souhaitables. De cette manière, le géant asiatique a compris en 2013 que pour augmenter sa puissance géopolitique, il devait utiliser sa puissance économique. Pour cette raison, il a créé des institutions telles que la Banque asiatique d’infrastructure et d’investissement ou la Banque chinoise de développement. Ce dernier possède, selon le livre des auteurs précités, plus de 980 milliards de dollars, surpassant la Banque mondiale.

Le gouvernement chinois, à travers ces types de banques, a accordé des prêts à plusieurs pays d’Amérique latine puisque, depuis 2005, il leur a prêté plus de 141 milliards de dollars, dépassant en plusieurs années le total des prêts consentis par la Banque mondiale, l’Inter -American Bank Development et CAF.

Dans cette veine, le gouvernement chinois a accru l’interdépendance économique en sa faveur, non seulement en Amérique latine, mais aussi à l’échelle mondiale, ce qui lui a donné un large pouvoir géopolitique. De cette façon, vous pouvez voir comment le géant asiatique a appliqué, au niveau géoéconomique, la maxime de Sun Tzu selon laquelle la véritable excellence ne consiste pas à gagner toutes les batailles, mais à vaincre votre ennemi sans avoir commencé à se battre, ce que maintenant l’Europe, L’Inde et, dans une moindre mesure, les États-Unis cherchent à contrebalancer.

Selon un diplomate de l’Union européenne, mentionné dans le Financial Times, il existe désormais une fenêtre d’opportunité pour établir une plate-forme de mondialisation basée sur des alliances plus fortes que ce que la Chine peut offrir. De même, on peut voir à quel point l’intérêt de cette nouvelle initiative est de présenter une alternative qui puisse rivaliser avec la puissance géoéconomique chinoise, pour l’empêcher de devenir la puissance dominante.

Il est important de mentionner que le président américain Joe Biden a déclaré le mois dernier qu’il avait mentionné à Boris Johnson qu’il devrait y avoir un effort conjoint de l’Occident qui cherche à contrebalancer l’initiative Belt and Road. Pour cette raison, il sera intéressant d’analyser non seulement la progression de ces efforts de l’UE, mais également le rôle que la discussion de cette plate-forme jouera lors de la prochaine réunion du G7 en juin.
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