Taxe ou État

L’urgence sanitaire a eu de graves conséquences pour l’économie, qui s’est contractée de près de 7% en 2020, la trésorerie, dont le recouvrement est réduit et dont la dette s’est accrue pour éviter l’effondrement social, et la société, dont les perspectives se sont rétrécies. Le gouvernement propose une réforme fiscale et soutient que cela réduirait la pauvreté. Il vise à contrer les problèmes avec un programme de revenus solidaires qui abriterait 40% de la population, une proportion similaire à celle de la Scandinavie, sans fondations solides pour le rendre durable.

Pour augmenter la collecte, il propose d’ajuster la TVA, avec un impact sur le coût des protéines animales, de taxer les retraites et d’instaurer une nouvelle taxe sur le patrimoine de ceux qui paient aujourd’hui des impôts, et de réduire l’aide au logement social. Elle sème aussi des anticipations sur la soi-disant règle budgétaire, qui limite le déficit budgétaire par rapport au produit intérieur brut.

Le plus gros problème de la proposition est qu’elle met au carré la case des finances publiques au détriment de la classe moyenne, dont l’engagement fiscal augmenterait avec la réduction du revenu minimum nécessaire pour avoir l’obligation de produire des déclarations de revenus et de payer des impôts. En revanche, le problème des personnes physiques qui éludent et évitent de payer des impôts de manière systématique n’est pas abordé.

Luis Jorge Garay a montré comment celui qui a le revenu le plus élevé paie des impôts sur le revenu dans une proportion similaire à celle payée, en moyenne, par l’ensemble des personnes physiques entre les 10% et 20% ayant le revenu le plus élevé, plus faible à son tour que du groupe des personnes physiques entre 10% et 1%.

Cette situation aberrante au sommet de la pyramide des revenus, au profit de ceux qui paient des comptables et des avocats sophistiqués pour concevoir des solutions qui augmentent les inégalités, nécessite une action audacieuse, qui doit inclure des sanctions pénales efficaces.

Il ne serait pas entendu que le Congrès n’a pas examiné la proposition Fedesarrollo, qui est de loin supérieure à la proposition officielle, comme l’ont reconnu les experts. Le gouvernement ne s’en réjouit pas car ce n’est pas leur produit. Beaucoup plus important est qu’il ne reconnaît pas le problème central de la Colombie:
l’inefficacité générale des processus publics, dont la tragique conséquence est que les inégalités sont pratiquement les mêmes avant et après impôts.

L’État n’exerce pas efficacement le monopole du pouvoir coercitif, la performance du législateur et de la justice est médiocre, le gouvernement central et les régions ne sont pas articulés avec des stratégies de développement à long terme basées sur des avantages comparatifs relatifs, et l’éducation du public est consternante.

Cette conjonction inhabituelle rend la proposition de revenu de solidarité irréalisable. Il faut fixer ce qui est public pour augmenter la très faible productivité de l’économie nationale, pour que l’Etat, au lieu d’un fardeau, soit un facteur de réussite dans l’épopée. Une croissance rapide et soutenue du produit intérieur brut augmenterait la valeur de la main-d’œuvre, réduirait les inégalités et améliorerait les perspectives d’avenir. Pendant ce temps, le problème fiscal peut être résolu avec la vente de 37% d’Ecopetrol, sans perdre le contrôle.

La situation actuelle en Colombie nous oblige à voir grand. Les problèmes doivent être transformés en opportunités.
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